La drépanocytose : définition, symptômes, transmission, dépistage et traitement
La drépanocytose (ou anémie falciforme) est une maladie génétique grave transmise par les deux parents. Souvent diagnostiquée à la naissance, la drépanocytose touche plus particulièrement les populations antillaises, africaines, méditerranéennes, indiennes et également Sud-Américaines.
Qu’est-ce que la drépanocytose ?
La drépanocytose est une anomalie de l’hémoglobine qui se manifeste généralement par :
- Une anémie (provoquant fatigue, vertiges, essoufflements)
- Une plus grande sensibilité aux infections bactériennes
- Des crises douloureuses appelées crises vaso-occlusive (obstruction des vaisseaux).
La drépanocytose est due à la mutation d’un gène localisé sur le chromosome 11 et provoque la déformation des globules rouges qui prennent la forme de faucilles (croissant de lune). On parle alors de drépanocytes.
Cette « falciformation » gêne la circulation du sang à travers les plus petits vaisseaux sanguins et diminue ainsi l’oxygénation des tissus
Bon à savoir :
L’hémoglobine est une protéine contenue dans les globules rouges, elle sert à transporter l’oxygène aux différents organes du corps.
Les globules rouges de forme normale
d’une personne non atteinte de drépanocytose.
Les globules rouges en forme de faucille
d’une personne atteinte de drépanocytose.
Symptômes et complications de la maladie
L’anémie
Les drépanocytes étant plus fragiles que les globules rouges normaux, ils sont détruits plus rapidement par l’organisme (durée de vie respectivement de 3 semaines et 2 mois), ce qui provoque un déficit en globules rouges donc en hémoglobine (appelé anémie).
Symptômes :
- Pâleur, fatigue, vertiges
- Sensation de faiblesse
Cette anémie s’associe à un ictère (résultat de la dégradation précoce des globules rouges) dont les signes visibles sont une pigmentation anormalement jaune des yeux ou de la peau et une coloration foncée des urines.
Ces manifestations peuvent rester sans gravité mais peuvent s’aggraver brutalement en cas de fonctionnement excessif de la rate, appelé séquestration splénique, ou en cas d’infections à l’origine de crises dites aplasiques.
La crise vaso-occlusive
Les drépanocytes étant plus rigides que les globules rouges normaux, ils se déforment moins facilement et peuvent gêner la circulation veineuse, ce qui provoque une mauvaise irrigation sanguine de certains organes, donc une mauvaise oxygénation.
Symptômes :
Cela se manifeste par des douleurs brutales et vives dans certaines parties du corps, plus généralement au niveau des os, des pieds et des mains, des poumons et du cerveau.
Ces crises vaso-occlusives sont favorisées par la déshydratation, c’est pourquoi il est recommandé de boire beaucoup d’eau, mais également par le froid, l’altitude, le stress, les efforts excessifs, les infections.
Elles peuvent être responsables d’accidents ischémiques transitoires (AIT) voire d’accidents vasculaires cérébraux (AVC). Ces AVC concernent plus particulièrement les enfants entre 4 et 6 ans, un surveillance médicale régulière par échographie-doppler transcrânienne permet de les détecter précocement et de mettre en place un traitement de longue durée.
Comment se transmet la drépanocytose ?
La drépanocytose est une maladie génétique, héréditaire ou transmise à l’enfant. Le mode de transmission se fait selon le mode autosomique récessif.
Que veut dire autosomique ?
“Autosomique” signifie que les gènes mutés ne se situent pas sur les chromosomes sexuels X ou Y (mais sur une des 22 autres paires de chromosomes appelés autosomes), ce qui implique qu’elle atteint aussi bien les filles que les garçons.
Que veut dire récessif ?
Nous portons tous deux copies de chaque gène : une copie est héritée de la mère et une copie est héritée du père. Le terme “récessif” signifie que les deux copies doivent être mutées pour que la maladie se déclare.
Ainsi, seuls les enfants ayant reçus le gène muté à la fois de leur père et de leur mère sont atteints de drépanocytose (on dit qu’ils sont homozygotes SS).
Qui est concerné ?
Dans le monde
La drépanocytose est particulièrement fréquente dans les populations d’origine antillaise, africaine et méditerranéenne. Elle est également présente en Inde et en Amérique du Sud.
Pour rappel, pour que l’enfant soit drépanocytaire, il faut que les 2 parents aient transmis une chromosome muté. Si ce n’est pas le cas (1 seul chromosome muté), il n’est alors par atteint de la maladie. Par contre, cette unique mutation confère à son porteur une certaine protection contre le paludisme qui est fortement présent dans ces régions.
L’absence de données fiables dans la plupart des pays rend difficile l’estimation du nombre de personnes touchées par la drépanocytose dans le monde, mais l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime ce chiffre à environ 5 millions de personnes.
En France
En France, la fréquence de la drépanocytose varie selon les régions et les origines de la population locale. On estime à environ 7 à 8000 personnes atteintes, mais ce chiffre reste approximatif. En moyenne, il naît chaque année environ 450 enfants drépanocytaires, dont environ 80% en France métropolitaine (une majorité en région parisienne).
Le dépistage de la drépanocytose
L’importance du diagnostic
- Bien que cette maladie reste rare, le dépistage est conseillé lorsque l’on est en âge de procréer car le gène de la drépanocytose se transmet à l’enfant.
- Plus cette maladie est dépistée tôt, meilleure sera la prise en charge et les chances de survie.
- Savoir que l’on est atteint de drépanocytose permet de prévenir certaines aggravations aux manifestations douloureuses et ainsi améliorer sa qualité de vie.
Réaliser un dépistage de la drépanocytose
Une prise de sang
Sans être à jeun
En laboratoire de biologie médicale
Sur ordonnance
Avec un prélèvement sanguin, il est possible de réaliser plusieurs analyses pour détecter la drépanocytose :
- Mise en évidence des globules rouges en forme de faucille : Le frottis sanguin observé au microscope permet de mettre en évidence les globules rouges falciformes contenus dans le sang des patients drépanocytaires.
- Mise en évidence de l’hémoglobine S : L’hémoglobine contenue dans les globules rouges est analysée par électrophorèse et chromatographie, cette analyse permet de mettre en évidence l’hémoglobine anormale.
- Les tests génétiques : Dans certains cas, la biologie moléculaire permet de mettre en évidence la mutation du gène de la β-globine impliqué dans la drépanocytose.
Le dépistage néonatal en France
Le dépistage néonatal de la drépanocytose par recherche de l’anomalie génétique est réalisé en France dans le cadre du dépistage de maladies rares à la 72ème heure de vie de certains nouveau-nés à partir d’un prélèvement sanguin réalisé au talon.
Dans les départements outre-mer (DOM), il est réalisé de façon systématique sur tous les nouveau-nés.
En France métropolitaine, pour que le nouveau-né soit dépisté, il doit présenter une des conditions citées :
- Les deux parents sont originaires d’une région à risque*
- Un seul des deux si le deuxième n’est pas connu
- Il existe des antécédents familiaux de drépanocytose
- Il existe un doute pour les critères 1, 2 ou 3
*Régions à risque : Départements français d’outre-mer : Antilles, Guyane, la Réunion, Mayotte. Tous les pays d’Afrique subsaharienne (République Démocratique du Congo) et le Cap-Vert. Amérique du Sud (Brésil), Noirs d’Amérique du Nord. Inde, Océan Indien, Madagascar, Île Maurice, Comores. Afrique du Nord : Algérie, Tunisie, Maroc. Italie du Sud, Sicile, Grèce, Turquie. Moyen-Orient : Liban, Syrie, Arabie Saoudite, Yémen, Oman.
Test réalisé
après la naissance
La surveillance des personnes atteintes
Grâce au dépistage néonatal, il est possible de prendre en charge les enfants drépanocytaires très précocement. Autour de l’âge de 2 mois, un suivi médical est mis en place, ainsi qu’un réseau de soin pluridisciplinaire sur lequel les parents pourront s’appuyer.
Parmi les mesures mises en oeuvre :
- Vaccination de l’enfant selon le calendrier vaccinal obligatoire auquel s’ajoutent la vaccination contre la grippe, le BCG (contre la tuberculose), ainsi que la vaccination contre l’hépatite A et la typhoïde (en cas de voyages).
- Éducation des parents sur les mesures d’hygiène de vie à adopter (hydratation régulière, prévention des refroidissements, hygiène buccodentaire et hygiène corporelle, etc.).
- Surveillance tous les 2 puis 3 mois avec bilan sanguin, échographies, radiographies, échodoppler transcrânien à partir de l’âge de 12 à 18 mois, etc.
- Éducation des parents sur les signaux d’alerte justifiant une consultation en urgence.
- Prise en continu d’un antibiotique pendant au moins 5 ans.
- Supplémentation en vitamine B9 (folates).
Le traitement de la drépanocytose
Bien qu’il n’existe pas de traitement actuel permettant de guérir la drépanocytose, il est cependant possible de bénéficier d’une prise en charge pour soigner et diminuer les symptômes.
Une prise en charge adaptée
La prise en charge de la drépanocytose varie selon les atteintes :
- L’anémie aigüe nécessite des transfusions sanguines
- Les crises douloureuses vaso-occlusives sont diminuées par la prise d’antalgiques par voie orale. Parfois une hospitalisation peut être mise en place pour une réhydratation et une administration d’antalgiques plus puissants.
Un traitement de fond pour maîtriser les crises
Lorsque les crises douloureuses sont trop fréquentes et trop sévères, des traitements de fond peuvent être envisagés mais présentent des effets secondaires, la balance bénéfice/risque est donc bien étudiée avant leur mise en place :
- Prescription d’hydroxyurée qui va stimuler la production par la moelle osseuse d’une hémoglobine fœtale dite hémoglobine F et donc diminuer le pourcentage d’hémoglobine S présente dans le sang des patients atteints de drépanocytose.
- Greffe de cellules souches dite “hématopoïétiques” : les cellules de la moelle osseuse du patient sont remplacées par des cellules de la moelle osseuse d’un donneur.
Un espoir avec la thérapie génique
La thérapie génique représente à l’heure actuelle un espoir de guérison pour les patients.
Elle consiste à insérer dans les cellules du patient le gène codant pour l’hémoglobine normale, stratégie parfois complétée par la réduction de l’activité de la β-globine mutée. Des essais ont déjà été réalisés et d’autres sont en cours pour tenter de guérir les patients.
Sources :
- La drépanocytose, Orphanet, 2011
- Dépanocytose, VIDAL, Décembre 2021
- Dépistage néonatal de la drépanocytose en France, HAS, 2014
- Drépanocytose, la maladie génétique la plus fréquente en France, Inserm, 2020
- Combination of lentiviral and genome editing technologies for the treatment of sickle cell disease, Molecular Therapy, Août 2021